CIG Magazine N°13

MASSACRES EN ISRAËL : CE SILENCE ASSOURDISSANT TEXTE MARKUS TENRUM C’est un silence de plomb qui a longtemps pesé sur les massacres et la prise d’otages perpétrés par le Hamas sur le sol israélien. Avec un bilan de plus de 1400 morts et quelque 240 vies retenues, les exactions du groupe terroriste ont suscité un déroutant mutisme dans les sphères des associations non-gouvernementales, in real life ou sur les réseaux sociaux. Pourquoi ? Éléments de réponse. «Parmi mes amis, personne, sinon des coreligionnaires, ne m’a fait part de sa sollicitude. » C’est heurté que Jonathan s’exprime sur le silence pesant qu’il observe dans son entourage et sur les réseaux sociaux. Après plusieurs semaines de conflit et la rétention persistante d’un certain nombre d’otages dans la bande de Gaza (58 otages israéliens et étrangers ont été remis au Comité International de la Croix-Rouge la semaine du 20 novembre, en échange de la libération de 117 prisonniers palestiniens), le sentiment que la scène médiatique se tait sourdement s’installe. « Les personnes qui se mobilisent contre l’horreur de la nuit du 7 octobre se trouve être juives, dans la plupart des cas. » Pourquoi entend-on un tel silence ? RAPPEL DES FAITS Samedi 7 octobre. Il est 6h 29 quand les premières sirènes retentissent. Le groupe islamiste terroriste Hamas lance alors, depuis la bande de Gaza, une offensive d’une ampleur sans précédent et attaque Israël par les airs, la terre et la mer. L’opération «Déluge Al-Aqsa » consiste en des milliers de roquettes tirées depuis l’enclave palestinienne, déjouant ainsi le Dôme de fer, le dispositif de défense antiaérienne de l’État hébreu, et en l’attaque de combattants terroristes. Dans la lueur du petit matin, ils franchissent la barrière de sécurité qui sépare Israël du territoire palestinien, réputée la plus sécurisée du monde, pour tuer, brutaliser et kidnapper hommes, femmes et enfants. Quelques jours plus tard, les chiffres éloquents s’imposent : plus de 1400 morts, et près de 240 otages selon les autorités israéliennes. Ces attaques vont au-delà du terrorisme, et font figure de véritables massacres contre les Juifs, sans précédent depuis la Shoah. Vieilles dames qu’on vient chercher dans leur lit ; jeunes filles abusées dont les cadavres sont exhibés ; enfants, dont 17 sont âgés de moins de 10 ans, séparés de leurs parents et conduits dans la bande de Gaza. Loin d’incarner un mouvement de libération du territoire enclavé, ces actes de barbarie se nourrissent et témoignent cruellement d’une haine du juif. Côté israélien, la riposte ne tarde pas : dans la matinée du 7 octobre, le Premier ministre, Benyamin Netanyahu, annonce une réponse militaire d’envergure. Lundi 9 octobre, le gouvernement annonce le siège complet du territoire enclavé. L’opération «Glaive de fer » est quant à elle lancée dès le mercredi 11 octobre. Elle engage le bombardement massif de Gaza et masse des troupes à la frontière, impliquant le rappel des réservistes israéliens partout dans le monde. Bilan côté palestinien après 96 jours de conflit : plus de 22835 victimes, selon le Ministère de la santé du Hamas. NON-DITS HELVÈTES 50 ans presque jour pour jour après le début de la guerre du Kippour, au crépuscule des fêtes de Souccot, l’attaque surprise du Hamas est sans précédent depuis la création de l’État d’Israël, en 1948. Et pourtant, les non-dits qui pèsent sur ces exactions sont déroutants, particulièrement en Suisse. Le Département fédéral des affaires étrangères a condamné l’attaque immédiatement, exigeant « la fin immédiate de l’usage de la violence », et arguant la nécessaire protection des civils, sans toutefois que le Conseil fédéral révise sa position vis-à-vis du Hamas. Le 10 octobre, Philippe A. Grumbach, avocat, ancien président de la Cicad, ancien président de la Communauté Israélite de Genève, publie une lettre ouverte poignante au conseiller fédéral Ignazio Cassis, diffusée par la Tribune de Genève, dénonçant la frilosité de la Confédération : «Quelle image la Suisse – plus belle démocratie au monde – soucieuse du respect de ses minorités linguistiques et confessionnelles, donne-t-elle en refusant de reconnaître le Hamas comme organisation terroriste ! ». Dès le 11 octobre, le Conseil fédéral condamne avec la plus grande fermeté « ces actes terroristes » et appelle à la libération immédiate des otages détenus par le Hamas. Il émet alors l’avis que le groupe armé doit être qualifié d’organisation terroriste. Pour le moment, la task force Proche-Orient mise en place par le Département fédéral des affaires étrangères étudie encore les options juridiques pour interdire l’organisation. CONDAMNATIONS INTERNATIONALES Sur la scène internationale, les réactions ont été fermes. Dès le 7 octobre, l’Union européenne a condamné « sans équivoque » les attaques du Hamas contre Israël. Elle a appelé à l’arrêt immédiat des violences et a réclamé la libération de civils pris en otage en violation du droit international. L’Union européenne a affirmé, à travers un tweet de la présidente de la commission, Ursula von der Leyen, « le droit d’Israël à se défendre contre de telles attaques haineuses ». Charles Michel, le président du Conseil européen a fermement condamné « les attaques aveugles contre Israël et son peuple », « des attaques violentes qui sèment la terreur parmi d’ innocents citoyens. » La France a elle aussi condamné les actes perpétrés par la branche armée du Hamas. « Je condamne fermement les attaques terroristes qui frappent actuellement Israël. J’exprime ma pleine solidarité avec les victimes, leurs familles et leurs proches », a déclaré le président français Emmanuel Macron. ® ILLUSTRATION JOANN SFAR 15 OC TOBRE 2023 – JANV I ER 2024 L’ENQUÊTE

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