© SHUTTERSTOCK © SHUTTERSTOCK Mel Brooks, humor iste, producteur et réalisateur, a utilisé le r ire tout au long de sa carr ière comme arme. Si bien qu’ il a été couronné des plus prestigieuses récompenses pour son œuvre. juive, car on peut rire de tout, mais pas n’importe comment et peut-être pas avec tout le monde. Car la particularité principale de l’humour juif est de se diriger contre les Juifs euxmêmes, le folklore et les traditions qui les entourent. Il se caractérise aussi par son anticipation des attaques et caricature les défauts de tout un peuple, présentant des individus, certes différents culturellement d’un pays à l’autre, mais tous unis par un passé commun. Pour ne pas paraître antisémite et exercer un certain pouvoir libérateur, une blague doit être dotée de bonnes intentions. Le risque n’est pas systématique. Mais le doute de la transgression persiste. À moins d’être aussi agile que le fut Pierre Desproges dans son spectacle de 1986. «On me dit que des Juifs se sont glissés dans la salle ? Vous pouvez rester », pouvait-on l’entendre dire au début de son show. Et de poursuivre : « N’empêche qu’on ne m’ôtera pas de l’ idée que pendant la dernière guerre mondiale, de nombreux Juifs ont eu une attitude carrément hostile à l’égard du régime nazi ». Audacieux, voire carrément insolent et choquant pour certains. Mais si drôle car si flagrant pour d’autres… Impossible de ne pas comprendre que par cette évidente provocation, ce ne sont pas les Juifs qui sont visés, mais bien ceux qui s’en moquent. LES JUIFS AMÉRICAINS, MAÎTRES EN LA MATIÈRE Durant le début des années 80 et les décennies qui ont suivi, l’humour juif s’est particulièrement développé aux ÉtatsUnis. Jerry Seinfeld, comédien, humoriste et auteur américain, maître incontesté du stand-up et pionnier en la matière, a aussi captivé les téléspectateurs grâce à la série portant son nom, devenue une base humoristique pour toute une génération et plus encore. Injustement peu connus de ce côté du globe, les 180 épisodes de la sitcom « Seinfeld » produits par Larry David, lui aussi de confession juive, ont pourtant influencé tous (ou presque) les humoristes contemporains, juifs ou non. D’ailleurs, le nombre de « guests » impressionnant (Denise Richards, Courtney Cox, Bryan Cranston, pour ne citer qu’eux) prouve à quel point la série était convoitée par le « tout Los Angeles ». Toujours disponible sur les plateformes de streaming actuelles ou rediffusée à la télévision selon les pays, la série « Seinfeld » se regarde de préférence dans sa version originale pour en saisir tout son sens. Les traductions et doublages dans certaines langues, comme l’allemand ou le français, sont reconnus comme étant de piètre qualité du fait des sujets abordés et de la difficile retranscription, comme l’Holocauste. Mais, avant Jerry Seinfeld, d’autres noms de l’humour juif américain ont aussi apporté leur contribution au monde de la comédie, devenant des références incontournables, à l’image de Woody Allen, Mel Brooks ou encore des Marx Brothers. Ces légendes de la scène comique internationale ont non seulement popularisé une forme d’humour, mais ont aussi participé à le diversifier à travers les époques le rendant quasiment intemporel. Ils ont également libéré des artistes en devenir qui se sont révélés dans d’autres pays comme Popeck ou Élie Kakou, dans les années 90. LA NOUVELLE VAGUE Faisant suite à ces géants du rire, Gad Elmaleh a emboîté le pas dans les années 2000, renouvelant le genre en suggérant une vision moderne et singulière. Grâce à des sketch comme «Coco » (nom qu’il a ensuite repris pour son film), il a marqué les esprits en exposant sa plus grande fierté : la Bar-Mitsva de son fils, organisée au Stade de France. Un humour franc et direct, rattachant des traditions à des éléments contemporains et usant d’une exagération extrême, pour aller toujours plus loin dans la caricature. Un exercice qu’il a toujours réussi avec brio. Grâce à lui, d’autres ont suivi comme Jonathan Cohen, devenu célèbre notamment grâce à son personnage Serge le Mytho, usant de l’hyperbole et de la démesure 20 L’ENQUÊTE LE MAGA Z INE DE L A C I G N ° 1 5
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