CIG_JOURNAL_N°14_FLIPBOOK

comme boucliers humains. Israël prend de nombreuses mesures pour réduire les dommages causés aux civils et fait d’ailleurs tout son possible pour apporter plus d’aide humanitaire à la population. Mais nous devons aussi rappeler aux gens pourquoi nous sommes dans cette situation : elle a été créée par le Hamas. N’est-ce pas trop difficile de quitter votre poste en pleine crise ? Je prends ce départ de manière positive. Après quatre ans, il est temps de revenir à la maison. J’ai une partie de mes enfants en Suisse, une autre en Israël... C’est le bon moment de réunir la famille. Je pense aussi qu’il est nécessaire d’amener d’autres personnes autour de la table, afin d’apporter une énergie nouvelle et un regard différent. Et puis, nous ne changeons pas tous en même temps. Je ne suis pas seule à Genève, j’ai une équipe fantastique autour de moi. Une partie va rester à la mission après mon départ. Il y aura donc une certaine continuité... Comment va votre famille ? Tout le monde va bien. J’ai trois enfants. Deux sont en Israël, le troisième est en Suisse. Mais c’est une période compliquée. Le 7 octobre, ma fille était dans le Golan, au nord du pays. Après avoir passé son baccalauréat en Suisse, elle était retournée au pays en août. On se pose alors beaucoup de questions... Comment garantir notre sécurité ? Comment surmonter la peur et les traumatismes ? Elle est très contente que nous revenions à la maison. Comment mesurez-vous l’atmosphère générale au sein de la communauté à Genève ? C’est ma cinquième mission à l’étranger, j’ai vécu deux fois aux États-Unis. Au Vietnam ou au Kenya, les communautés juives étaient certes plus modestes... Mais, dans chaque pays, en tant que diplomate israélien, il y a une « famille » prête à vous accueillir. À Genève, j’ai vraiment apprécié ma relation avec cette communauté, que j’estime très sioniste et solidaire d’Israël. Il y a des différences et des opinions divergentes, comme dans toutes les familles, dirais-je... (sourire) Pour moi, qui dois me battre au quotidien aux Nations Unies, me retrouver dans cette communauté, pour un dîner ou pour une simple discussion, était de vrais moments de relaxation. Cela a-t-il changé après le 7 octobre ? Nous tentons d’impliquer la communauté dans tout ce que nous faisons. Nous les invitons régulièrement à des événements que nous organisons. Mais, le 7 octobre, une fois que nous avions compris ce qui s’était passé, nous avons tout de suite cherché à informer la communauté. Nous étions en plein chabbat, certains membres n’étaient donc pas au courant... Nous avons donc rédigé une lettre et nous l’avons amenée en personne dans les différentes synagogues de Genève afin qu’elle soit lue le samedi soir. Les connexions sont très fortes entre les membres de communauté et Israël : beaucoup ont de la famille ou des amis là-bas, ils y vont régulièrement pour leur rendre visite... Il était normal que nous pensions tout de suite à les informer de la situation. Et, dès la première semaine, ils se sont pleinement investis pour accueillir les familles des otages ou pour organiser des manifestations de soutien sur la place des Nations. Pourquoi la position d’Israël est-elle aussi difficile à comprendre ? L’histoire de notre peuple n’est pas simple et beaucoup de gens ont une vision trop simpliste de la situation : ils sont souvent mal informés, ou alors se refusent à regarder les faits. Après des siècles de souffrance, nous sommes simplement retournés sur notre terre ancestrale pour prendre notre destin en main. C’est ce qu’on appelle le sionisme, et sa concrétisation avec la création de l’État d’Israël. Mais, aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, les opinions sont extrêmement polarisées : vous êtes soit pour, soit contre. Or, la réalité n’est pas noire ou blanche, elle est grise, avec ses différentes nuances ! Il est impossible de résumer la situation en deux phrases, ou en 280 caractères, et le problème, c’est que si quelqu’un ne veut pas écouter vos arguments, il n’a qu’à se déconnecter... Il est aussi intéressant de voir qu’au sein des Nations Unies, les Palestiniens se sont efforcés de créer des entités, dédiées à leur cause, susceptibles de soutenir et légitimer leur discours. Cela a commencé très tôt : Israël a été créé en 1948 et, un an plus tard, l’ONU fondait l’UNRWA (ndlr. Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le ProcheOrient), dont le but est d’imposer une certaine vision politique. Tous ces rapports et ces résolutions contre Israël n’ont peut-être pas d’effet immédiat, mais ils contribuent à construire les différentes couches d’une histoire – la leur. Dites-moi combien de personnes à l’ONU sont conscientes de la santé mentale des Israéliens à l’heure où je vous parle ! Ils ne sont pas nombreux. Cela doit être assez frustrant, non ? C’est un combat au quotidien. Saviez-vous que plus de 100000 personnes ont été évacuées du nord du pays ? Les médias internationaux n’en ont pas parlé. Dans le langage diplomatique, on les appelle des IDPs pour « internally displaced persons ». Ils ne vivent pas dans la rue ou sous des tentes, nous devons prendre soin d’eux, leur trouver un logement, dans un hôtel ou une maison, construire des écoles... Cela fait sept mois qu’ils habitent loin de chez eux. Mais personne n’en a fait mention. Je ne dis pas que c’est intentionnel, il y a beaucoup d’ignorance et de naïveté. Comment envisagez-vous la fin de la guerre ? C’est une question difficile. D’abord, je ne vois pas de fin immédiate sans la libération des 120 otages. Tout le pays, qu’il soit de gauche ou de droite, exige cette libération. D’autre part, nous devons faire en sorte que le Hamas ne sorte pas renforcé de ce conflit. Ses infrastructures militaires doivent être démantelées. Le changement passera aussi par une mutation du leadership palestinien qui devra baser son éducation sur la paix, et non plus sur la haine. Ce ne sera pas simple, cela prendra du temps pour amener ces changements, mais nous ne pouvons pas permettre au Hamas de gagner cette guerre, nous n’avons pas ce luxe. Ils doivent être vaincus ! L’extrémisme islamique est partout. Le monde doit comprendre que tous ces groupes terroristes observent avec intérêt ce qu’il se passe en Israël. C’est pourquoi nous n’avons aucune autre alternative, pour les Israéliens comme pour le monde, que de vaincre le Hamas et l’extrémisme islamique. D’où vous vient cette passion pour la diplomatie ? Quand j’étais jeune, je rêvais de devenir une journaliste TV. J’avais d’ailleurs étudié le cinéma et la communication à l’Université de Tel-Aviv. Un jour, je suis tombée sur une publicité du ministère des Affaires étrangères qui recherchait des diplomates pour renforcer ses équipes. Ram, mon fu12 LE MAGA Z INE DE L A C I G N ° 14 LA RENCONTRE

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