CIG Magazine N°12

13 d’autres étudiants, ceux qui veulent vraiment rester dans cette profession, d’une place de stage. Il y aurait donc quelque chose à travailler avec les entreprises pour trouver d’autres filières de formation. Lorsque vous étiez Bâtonnier de l’Ordre des Avocats (2018-2020), vous disiez qu’il y a un manque de femmes associées dans les études. Mais est-ce que la situation a évolué depuis ? La profession est de plus en plus féminine. À l’Université, on observe une majorité de femmes en Faculté de Droit et c’est encore le cas dans les premières années de pratique. Cela s’inverse s’agissant du nombre d’associées dans les études. Il y a une sorte de plafond de verre contre lequel il faut se battre. Je ne crois pas aux quotas. Je pense qu’il faut le faire par l’encouragement. Mon épouse est elle-même associée dans son étude et, dans la mienne, je suis associé avec une majorité de femmes (ndlr. quatre sur six). Ce n’était pas une politique active de notre part. Il s’est trouvé que nous avions plus de candidatures féminines de qualité et, lorsqu’elles étaient en position de devenir associées, il nous paraissait naturel de les nommer sans se poser la question du genre. Pensez-vous que l’arrivée de l’intelligence artificielle aura un impact important dans le métier d’avocat ? Je m’y attends, oui. Mais en Suisse, nous ne sommes pas encore à un stade où l’intelligence artificielle occupe un rôle central dans notre activité. Cela reste un marché petit et compliqué, avec la multiplicité des langues et les jurisprudences dans les différentes langues. Cela demandera des investissements conséquents et je ne pense pas que cela arrivera du jour au lendemain. En revanche, cela pourrait, à moyen terme, favoriser la démocratisation de la justice pour un certain nombre de personnes, à des coûts plus raisonnables. Mais avec ses incertitudes et ses dérives. Il faut que l’on s’y prépare ! Ce sera un enjeu important, probablement plus pour la génération suivante que pour la mienne. À la fin du XXe siècle, on a aussi vu une génération d’avocats stars, très présents dans les médias ou à la télévision... Est-ce une époque révolue ? L’avocat est-il devenu un peu plus humble dans la pratique de sa profession ? Il y a moins de stars, certes, mais pour quelles raisons ? Parce qu’ils s’agissaient de personnalités particulièrement brillantes qui attiraient la lumière? Ou parce que la profession est devenue plus vaste au point qu’il est devenu plus difficile de se concentrer sur un ou deux individus ? Probablement un peu des deux. Je pense que les évolutions du droit ont aussi amené à cette situation, notamment avec la disparition du jury populaire. Des avocats se sont fait connaître dans le cadre de grands procès, devant un jury populaire, qui donnaient une vraie place au plaideur. Aujourd’hui, et depuis la réforme de la procédure pénale en 2011, le plaideur a un rôle plus limité. Cela a eu certainement un impact. À titre personnel, je ne suis jamais contre l’humilité, puisqu’elle a l’avantage de servir les gens plutôt que l’ego de leurs conseils. Mais, pour moi, le jury populaire présentait d’autres avantages, notamment en termes de présomption d’innocence. C’était une belle institution et je regrette sa disparition. Quel est votre rapport à la Communauté Israélite de Genève ? Les liens sont très forts. Je suis membre de cette communauté depuis l’enfance. Mes premières images sont celles du GAN, alors à la rue Saint-Léger, et celle de mon grand-père, Vladimir Halpérin, à Beth Yaacov. Il était un pilier de la communauté – qu’il a présidée à de nombreuses reprises – et accueillait les personnes de passage à leur entrée dans la synagogue, pour les installer devant, avant de les inviter à déjeuner pour chabbat. C’est aussi le regard perçant et bienveillant du Grand Rabbin Alexandre Safran zl. Plus récemment, c’est comme parent que j’ai pu suivre les activités du GAN et celles du CCJJ qui se sont beaucoup développées. Je suis aussi très admiratif du rôle essentiel joué par le Service social et de toutes les associations qui gravitent autour de la communauté pour le bien commun de ses membres. Ces dernières années, c’est aussi l’engagement sans faille de mon épouse, Sarah, vice-présidente de la communauté, qui consacre un temps dont elle ne dispose pas toujours au sein d’un Comité de grande qualité, avec la mission d’améliorer constamment les services et la gestion de la communauté. Quels seront les enjeux pour la CIG et, de manière plus générale, pour les communautés juives au Conseil national ? Il y en a plusieurs. En ce moment, l’interdiction des symboles nazis est à l’étude. Il est aussi question, sur le plan procédural, de la représentation des associations comme la CICAD en justice pour accompagner les victimes d’actes antisémites et poursuivre ceux qui encouragent au racisme et à l’antisémitisme. La question de la prise en charge des frais de sécurité est aussi essentielle, et si des efforts ont été faits ces dernières années, ils demeurent insuffisants. Je disais plus haut que l’État ne doit agir que lorsque cela est nécessaire, mais parmi ses tâches essentielles, il y a justement celle de la sécurité et les communautés juives ne devraient pas avoir à supporter le coût de la protection de leurs membres. J’espère, si je devais être élu, pouvoir porter ces sujets au Conseil national. ® SHUTTERSTOCK AVR I L-SEP TEMBRE 2023 En l ’espace de 10-15 ans, le nombre d’avocats a doublé à Genève. Ce qui pose un problème à l ’entrée de la profession : trop d’étudiants peinent à trouver une place de stage !

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