CIG Magazine N°12

LA RENCONTRE 12 Quel genre de campagne imaginez-vous avant cette élection ? En Suisse, le contact avec les gens est important. Il faut aller dans la rue, rencontrer un maximum de personnes, discuter, leur transmettre un certain nombre de messages et, surtout, les encourager à se mobiliser... Les gens ne votent pas beaucoup, alors que les enjeux sont importants. Il est donc essentiel de rappeler la chance que le peuple a de pouvoir choisir les politiciens qui le représentent et d’avoir en plus un pouvoir de contrôle hors norme avec notre système de démocratie semi-directe. Cela lui donne des droits, des acquis, qui contribuent à la paix sociale, mais aussi une certaine responsabilité. Voter est un acte citoyen important ! Vous représentez le Parti Libéral-Radical. Auriez-vous pu aller dans un autre camp, compte tenu de votre histoire familiale ? Aujourd’hui, je n’ai pas le moindre doute que ce choix correspond à ma personnalité. Dans notre pays, le PLR est le seul parti qui défend les libertés fondamentales – celles qui proviennent de l’héritage des Lumières. Parmi ces libertés, la liberté d’entreprendre et donc de travailler avec le moins de bureaucratie possible... Dans l’état dans lequel se trouve la Suisse, il est important de défendre la prospérité de notre économie, ainsi qu’une fiscalité raisonnable, et de faire en sorte que nous vivions dans une société qui donne des droits équitables à chacun et où les minorités peuvent vivre en paix. C’est le combat que l’on doit mener et je ne vois pas d’autre parti que le PLR pour le conduire ! Vous parlez de libertés... La lutte contre le réchauffement climatique et les objectifs écologiques fixés pour 2050 nous imposeront forcément des lois liberticides : interdiction de voyager, de consommer... Comment vous positionnez-vous par rapport à ce débat-là ? Vous touchez un sujet central. Je suis convaincu qu’il y a un vrai problème climatique et qu’il faut s’atteler à le résoudre en perdant le moins de temps possible. La question, c’est comment ? Doit-on le faire par toute une série d’interdits afin de réglementer la vie des gens et leur dire comment se déplacer, manger ou penser ? Plutôt que de prendre ça comme un fléau qui va peser sur nos épaules, voyons cette situation comme une opportunité de repenser notre réalité par l’innovation ! La Suisse est en position de le faire et a les moyens d’investir pour permettre aux entreprises locales de se développer dans des technologies de pointe. Le salut viendra de là – de cette capacité à se projeter dans le futur, et non dans cette volonté d’imposer des contraintes à des gens qui ne sont pas prêts à les accepter. Comment expliquer que de nombreux avocats se lancent en politique ? Quand il s’agit de rédiger des lois, le fait d’être avocat aide dans une certaine mesure à mieux comprendre les enjeux. Par ailleurs, la profession d’avocat est ancrée profondément dans la défense et la représentation des gens. Nous avons donc une sensibilité particulière pour les droits des personnes et les libertés fondamentales. Il est donc logique qu’un certain nombre d’entre nous s’engagent et consacrent une partie de leur temps au bien-être de la cité. Comme pour la politique, avez-vous choisi le métier d’avocat parce que vous avez baigné dedans dès votre plus jeune âge ? Notre père ne nous a jamais poussés à faire de la politique ou à devenir avocat. Il faut croire toutefois que de le voir s’épanouir dans son métier nous a probablement inconsciemment orientés, ma sœur Anouchka et moi-même, dans cette direction. À cela s’ajoute qu’il a toujours fait en sorte, même s’il était très occupé, que nous ayons une vraie vie de famille. Enfant, je n’avais pas particulièrement vocation à devenir avocat, et c’est après mes études et le début de mon stage que cette profession s’est imposée à moi comme une évidence, parce que c’est un métier passionnant – par la diversité des dossiers, par le fait qu’on entre dans l’intimité des gens ou qu’on découvre des activités professionnelles très diverses. Il n’y a pas un jour où j’ai l’impression de faire la même chose que la veille. Quelle est votre domaine de compétences? Je suis plus spécialisé dans l’activité économique et financière : la criminalité économique, les litiges commerciaux... Mais j’ai tenu à garder une activité diversifiée, peut-être plus que d’autres avocats. Un avocat, c’est d’abord un conseil, et les gens ont besoin d’être conseillés par quelqu’un qui a une vision d’ensemble. C’est cela qui me plaît ! Et tant au niveau des personnes physiques qu’au niveau des entreprises, il y a un réel besoin de ce regard transversal. Comment votre père, Michel Halpérin, vous a-t-il inspiré dans ce métier ? Il y a certainement un mimétisme qui s’est créé. J’ai eu la chance de travailler avec lui pendant un certain nombre d’années. Je n’ai pas honte à le dire : j’admirais beaucoup mon père et il m’a toujours encouragé dans les choix que j’ai faits. Beaucoup de gens viennent encore maintenant me parler de lui, neuf ans après son décès, et me disent à quel point il les a marqués par sa personnalité. Mon père était quelqu’un de courageux dans ses activités, il défendait ses idées et ses idéaux, même lorsqu’ils n’étaient pas du goût de tous, et il s’intéressait aux personnes. Il avait une vraie curiosité et une grande capacité d’empathie. J’essaie de m’inspirer de cela au quotidien. Comment a évolué le métier d’avocat ? Avez-vous observé une différence avec vos débuts ? Il n’y a pas de différence essentielle quant au métier lui-même. Mais nous vivons dans un monde de plus en plus judiciarisé, un mouvement qui nous vient des États-Unis. Je parlais de pénal médical... Les médecins, par exemple sont plus réticents à pratiquer certains gestes aujourd’hui, parce que si quelque chose tourne mal, le réflexe sera de judiciariser la problématique – parfois à tort. Surtout, la profession a beaucoup grandi, puisqu’en l’espace de 10-15 ans, le nombre d’avocats a doublé à Genève. Nous rencontrons donc un vrai problème à l’entrée de la profession, qui touche les avocats qui débutent : trop de gens peinent à trouver une place de stage, puis un poste de collaborateur à la sortie de leur stage. Il faut que les gens puissent vivre correctement de ce métier comme c’était le cas par le passé. Faudrait-il imposer un numerus clausus ? Je ne pense pas. Il faudrait plutôt se poser des questions notamment au stade de l’université. La Suisse est souvent citée en exemple pour son aptitude à développer les filières professionnelles. Or, on remarque que beaucoup d’étudiants choisissent le droit, mais n’aiment pas vraiment ces études. Il y a donc une orientation professionnelle à revoir. Je croise aussi de nombreuses personnes qui font leur stage en sachant pertinemment qu’elles ne deviendront pas avocates : simplement, c’est parfois un passage obligé pour pouvoir travailler en entreprise ! Mais cela prive LE MAGA Z INE DE L A C I G N ° 12

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