CIG Magazine N°08

LA CHRONIQUE DU RABBIN TOXICOMANIE ET HALAKHA La majorité des personnes qui tombent dans la toxicomanie le font pour des raisons qui dépendent des circonstances de vie dans lesquelles elles se trouvent. Il se peut qu’elles commencent à le faire par curiosité et finissent par devenir accro. Les principales raisons qui conduisent à une consommation de drogues et à une accoutumance sont les suivantes : la curiosité, la prescription médicale de drogues, les pressions de la vie, l’utilisation régulière des drogues qui améliorent le rendement, les mauvaises fréquentations, la pression du groupe et la facilité d’accès. La consommation de drogues est généralement associée aux jeunes, ou aux personnes marginalisées. Cependant, ces substances psychoactives sont consommées par des personnes aux profils très divers et aux âges très variés. Les drogues peuvent avoir différents effets plaisants, excitants et même hallucinogènes. Cependant, leur consommation a également de graves conséquences sur la santé des consommateurs et sur leur fonctionnement social : dérèglements neurochimiques dans le cerveau, altération de l’humeur, problèmes familiaux (relationnels et sociaux), problèmes cardio-vasculaires, affaiblissement du système immunitaire, problèmes respiratoires, conduite anti-sociale, anxiété et insomnie, etc. La surconsommation peut conduire à l’hospitalisation du patient, au coma et même à la mort. L’usage des drogues est devenu un problème social, et a suscité l’intervention des pouvoirs publics afin d’y apporter une solution, car la drogue développerait le sentiment d’immortalité, ferait perdre le goût du travail, ruinerait la santé physique et mentale des personnes, conduirait à la délinquance, causerait l’échec scolaire, détruirait les familles, aggraverait l’insécurité, propagerait les maladies, ferait prospérer la grande criminalité, déstabiliserait des démocraties... Et cette liste n’est qu’indicative. La consommation de drogues, du point de vue halakhique, est strictement interdite. Le Rambam, qui était aussi médecin, rapporte (Hilkhot Dé’ot, ch. 4, 1) : « Puisque le fait de s’assurer que son corps est en bonne santé et sain s’ inscrit dans la volonté de l’Éternel, il est impossible d’accéder à la connaissance des voies de D.ieu quand on est malade, en conséquence, il faut s’éloigner des éléments qui peuvent provoquer la déperdition du corps. » Il est donc évident qu’on a l’obligation de prendre soin de sa personne. À plus forte raison, devra-t-on fuir les conditions qui la mettent en danger ? Le cas le plus courant est l’usage de la drogue qui nuit gravement à la santé. Il y a d’autres arguments pour interdire son usage, rapportés par l’un des grands décisionnaires de notre siècle, Rav Moshé Feinstein zl, dans son ouvrage Igrot Moshé (Yoré Déa, 3, 35). • Le premier est le fait que les drogues affaiblissent et détruisent le corps, même si certaines personnes, en bonne santé, n’en souffrent pas directement. Mais l’impact sur l’esprit est toujours présent, empêchant la réflexion et le bon fonctionnement du cerveau. Concrètement, la personne qui se drogue ne parvient plus à étudier la Torah, à prier et à pratiquer les mitzvot, qui, sans implication de l’esprit, sont considérées comme n’ayant pas été réalisées. • En outre, le fait de tomber dans ce défaut fait terriblement souffrir les parents. Le consommateur de drogue transgresse la mitzva de kiboud av vaém (l’obligation du respect du père et de la mère). • Il faut encore ajouter, toujours selon le Rav Feinstein zl, l’abandon de l’injonction (Vayikra 19, 2), « Kédoshim Tihyou » (soyez saints), visant à ce que la personne restreigne son profit du monde. Pour le Rambam, la sainteté est une discipline où l’homme apprend la sobriété et la modération. Le Rav Moshé Feinstein zl établit un parallèle entre le « ben sorer oumoré », un fils dévoyé et rebelle, dont parle la Torah (Deutéronome XXI, 18 à 21), et la personne droguée. Les infractions dont est accusé le « ben sorer oumoré » sont similaires à celles dont se rend coupable le toxicomane. Tout comme les conséquences néfastes qui pourraient s’abattre sur la société à la suite de son mauvais comportement. Le fils rebelle est qualifié de Zolel véssové (viveur et buveur) : il a volé et mangé en un repas un « tartimar » (mesure de poids) de viande, et bu un « demi-log » (mesure de volume) de vin. Selon Rabbi Yossi Hagualilé (Sanhédrin, 72a), le fils rebelle est gravement sanctionné, car la Torah a pénétré la psychologie d’un tel enfant : il finirait par dilapider le patrimoine de son père, et cherchant en vain à assouvir ses passions comme par le passé (sans y parvenir), il guetterait aux carrefours et volerait les passants (lélastèm et habiryot). En d’autres termes, le caractère excessif de son appétit, par la stimulation exacerbée de son amour de la chair et des boissons, entraînerait le « ben sorer oumoré » à la délinquance. 8 LA CHRONIQUE DU RABBIN LE MAGA Z INE DE L A C I G N ° 08

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