CIG Magazine N°04

APPEL À LA TORAH PAR LE NOM DU PÈRE ADOPTIF OU BIOLOGIQUE Le ‘Hatam Sofer ( Even H’ézer, ch. 76) stipule que l’appel à la lecture de la Torah s’effectue par le biais du nom du père adoptif. Ce fut la position du Grand Rabbin d’Israël Rav Untermann tz’l. Cependant, le Rav Avraham-David Horowitz (ancien Dayan de Strasbourg), a été inter- pellé à ce sujet (voir Kinyan Torah Bahalakha, 7 e tome). Il conclut qu’il y a lieu de craindre, si l’on appelle l’enfant à la Torah par le nom de son père adoptif, et que si ce dernier meurt sans autres enfants, ayant un frère à qui il incomberait d’accomplir la mitzva de ‘Ha- litsa , l’on en vienne à se tromper et à penser que le défunt a une descendance, et qu’il ne soit pas nécessaire d’accomplir la ‘Halitsa . Par ailleurs, si l’enfant se fait appeler en tant que Cohen (ou Lévy) en pensant l’être réel- lement (puisque le père adoptif l’est), s’il se marie et a un fils aîné, il lui incombera d’ac- complir la mitzva du Pidyon Habén (rachat des premiers nés). Or les Cohanims (ou Léviyims) étant exempts de cette mitzva, celui-ci se pensera également exempt, et n’accomplira pas la mitzva qui lui incombe. Le Rav Horowits conclut dans sa réponse qu’il faut expliquer au père adoptif qu’il doit annoncer la vérité à son fils, et que le comportement de cacher la vérité n’est pas en accord avec une conduite telle que la Torah le préconise, surtout avec tous les risques d’interdits cités. Il faut absolument dévoiler la vérité à son enfant adopté. La vérité n’a pas à être cachée, et prendre acte de ces problématiques permet de rétablir la vérité et d’opter pour une conduite juste. Nous avons bien ici des cas où la Halakha contraint le juif à affronter sa réalité et ne point la fuir, et de vivre pleinement ce que sa réalité impose. Il serait convenable d’appeler l’adopté à la Torah par le nom du père biologique. Ce- pendant, si ce dernier est inconnu, il serait permis d’appeler l’adopté par le nom du père adoptif pour ne pas porter atteinte à la dignité de l’adopté (tout en lui dévoilant la vérité). Il en sera de même pour le nom écrit dans la kétouba (acte de mariage) ou le guett (acte de divorce). LA CIRCONCISION DE L’ADOPTÉ La Halakha (Yoré Dé’a, ch 261,1) stipule : « Si le père n’a pas circoncis son fils, la mitzva incombe au Beth-Din (tribunal rabbinique). » Dans notre cas, le père adoptif est considé- ré comme le messager du Beth–Din pour la circoncision. Le Ya’avets, dans Migdal Oz , rapporte : « Un orphelin qui n’a pas de père, le père adoptif remplace le père biologique pour le circoncire. » RESPECT DES PARENTS ET RÈGLES DE DEUIL L’adoption n’annule en rien les devoirs ha- lakhiques de l’enfant adopté à l’égard de ses parents biologiques. Bien qu’adopté, il reste l’enfant de ses parents biologiques ; et de ce fait, il est tenu de les respecter ; et à leur décès, il doit appliquer toutes les règles de deuil, durant les différentes pé- riodes (septième jour, trentième jour, etc.), et réciter le kaddish. Quant au respect des parents adoptifs, il ne relève pas d’un com- mandement thoraïque. La logique et le sa- voir-vivre imposent ce respect, en signe de reconnaissance à l’égard de ses bienfaiteurs (voir ‘Hatam Sofer, Ora’h Haïm , ch. 164). CONVERSION Pour la Halakha, la transmission de la judaïté se fait par la mère ; ainsi l’enfant adopté reste halakhiquement l’enfant de ses parents, qui l’ont mis au monde. Si sa mère de naissance n’est pas juive (ou si elle est inconnue), l’en- fant ne sera pas considéré comme juif et devra éventuellement être converti (si ses parents adoptifs le souhaitent). La conversion est ritualisée par l’acceptation des mitzvot, l’immersion dans un mikvé et par la circon- cision pour les garçons. Cette conversion est confirmée à la majorité religieuse (treize ans pour les garçons et douze ans pour les filles), confirmation qui devient implicite si la bar/bat mitzva est célébrée. YI’HOUD L’adoption d’enfants entraîne inéluctablement le problème du yi’houd (un homme ou une femme ne peut s’isoler seul à seul avec une personne de sexe opposé), et de l’interdiction de s’étreindre ou de s’embrasser les uns les autres (autre que les conjoints, les mères et leurs fils, ou les pères et leurs filles). Notons que ce même problème est rencontré lors d’un deuxième mariage, alors que chacun des deux conjoints a déjà des enfants d’un premier mariage. Si la femme a déjà une fille (d’un premier mariage), le problème du yi’houd se posera avec le mari ; et vice-ver- sa, si le mari a déjà un garçon, le problème se posera avec la femme. Ce n’est pas pour autant que les remariages sont interdits (voir Igrot Moshé, vol. 4, Even Haézer, question 71). L’adoption est une mitzva importante, mais il ne faut pas oublier que, selon la Halakha, l’enfant adopté n’est pas l’enfant de celui qui l’accueille ; et c’est la raison pour laquelle il faudrait faire preuve de vigilance. En conclusion, les questions relatives à l’adop- tion, comme déjà mentionné, sont nom- breuses et nous ne pouvons pas répondre à toutes ces questions dans un bref article ; des questions tout aussi importantes que de savoir si un parent adoptif ou biologique peut annuler l’adoption ; si l’adopté peut contracter un mariage avec les proches de ses parents adoptifs ou biologiques ; s’il peut être témoin de ses parents biologiques ou adoptifs et vice-versa ; s’il a une obligation de subvenir aux besoins financiers de ses parents adoptifs avec de faibles revenus ; s’il a droit à une part d’héritage lors du dé- cès de ses parents adoptifs ou biologiques. Chaque question a une réponse dans le cadre de la Halakha ! Rav Dr. Izhak Dayan, Grand Rabbin ® JENNA NORMAN – UNSPLASH 9 J U IN-SEP TEMBRE 2020

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